Les projections climatiques montrent que les périodes estivales seront de plus en plus chaudes notamment dans le Grand Sud. Les changements de modes de production (désaisonnement notamment) et la forte diminution des ressources fourragères en été contraignent les éleveurs à loger et affourager leurs animaux durant cette période. L’objet de cette étude est de repérer des innovations pour adapter les bâtiments à ces nouvelles contraintes. Elle permettra d’objectiver leur efficacité sur le confort thermique et de les caractériser au niveau économique, organisationnel et environnemental pour être transférables et adaptées aux besoins des éleveurs.
A l’issue de ce projet, seront élaborés des cas type d’innovations et des outils de diagnostics diffusés auprès des prescripteurs (conseillers, artisans, éleveurs).
Ce projet associe les compétences des acteurs de la recherche et du développement et reflète la diversité des systèmes d’élevage de petits ruminants du Grand Sud.
Les impacts du changement climatique sont d’ores et déjà mesurables dans les régions du Sud de la France. Face à cela, certains éleveurs ont mis en place des stratégies d’adaptation de leurs bâtiments ou sont en demande de conseil. Si l’élévation moyenne de la température sera de près de 2°C en 2050 (source www.drias-climat.fr), cette augmentation sera plus importante l’été et sera souvent alliée à de fortes sècheresses dans les régions du Sud de la France.
Les élevages de petits ruminants dans le Grand Sud (régions Nouvelle Aquitaine, Occitanie, Provence Alpes Côte d’Azur) représentent 52% du cheptel d’ovins allaitant, 71 % du cheptel d’ovins laitier et 65 % des caprins laitier du cheptel français (Source : SSP Enquête cheptel 2019). Ces productions sont essentielles pour le maintien des zones pastorales (plus de 2 400 000 ha sur la zone étudiée) et la vitalité des territoires ruraux maintien de la biodiversité, matière organique dans les sols, DFCI…). Leurs productions valorisées en SIQO (22) ou circuits courts participent à l’image de ces territoires et au chiffre d’affaire agricole de ces régions. Dans le Grand Sud, les ateliers étudiés produisent 291,4 millions de litres de lait de brebis, 410 millions de litres de lait de chèvre (transformés ou non), 66 000 tonnes équivalent carcasse d’agneaux et 3 256 tonnes équivalent carcasse de chevreaux.
En France, la consommation de produits laitiers issus des Petits Ruminants est en constante augmentation. Les consommateurs sont habitués à une consommation de produits quelle que soit la saison, cela oblige à dessaisonner les mises-bas pour étaler la production laitière ou de viande sur toute l’année et donc d’avoir des animaux en fin de gestation en période estivale, période critique pour couvrir les besoins.
Le bien-être animal des animaux constitue une attente sociétale importante et de nombreux projets se développent.
Ainsi, le projet de recherche GoatWell (2018/20), et le projet France AgriMer CMOUBIENNE lait qui a été accordé sur 2020-2022 définiront des indicateurs d’évaluation de bien-être animal.
Le confort thermique impacte fortement les performances techniques des élevages (quantité et qualité des produits). En effet, pendant les fortes chaleurs, les animaux baissent leur consommation fourragère et occupent des zones de bâtiment privilégiées en recherche de zone de confort (forte densité, litière souillée, fréquentation des zones d’alimentation/abreuvement…) ce qui a des conséquences sanitaires et zootechniques (baisse de croissance, de lactation, problèmes respiratoires, mortalité accrue). Ainsi dans le cadre du projet iSAGE, les productions de lait et de matière utile diminuent linéairement pour les caprins lait et ovins lait en lien avec l’élévation moyenne des températures. Des résultats espagnols sur ces même critères et années montrent un plafonnement dès 25°C des performances zootechniques. Des diminutions de consommation d’aliments ont été mesurées en cas de fortes températures dans le cadre des contrôles de performance.
Avec le besoin d’étalement de la production de lait, les agneaux sont actuellement engraissés tout au long de l’année dans les bâtiments. Sur les phases d’engraissement en périodes de fortes chaleurs, on observe plus de mortalité et un moindre gain moyen quotidien. Des solutions techniques sont à mettre en place pour ces ateliers, initialement conçus pour une ventilation hivernale. Le projet ROBUSTAGNO en Occitanie s’intéresse aux causes sanitaires de mortalité dans ces ateliers.
Pour éviter la dégradation des prairies en diminuant la pression de pâturage lors des périodes chaudes ou pour compenser la baisse de production des pâturages, les animaux sont affouragés en bâtiment. Dans les zones d’élevage où la présence des prédateurs rend difficile le pâturage nocturne éloigné des bâtiments, les troupeaux sont abrités en bâtiment.
Enfin ces systèmes ne seront durables que si le confort des travailleurs, éleveurs ou salariés sont également pris en compte. Ces adaptations permettront de conserver une attractivité du métier et un renouvellement des générations. La recherche de systèmes innovants pour assurer le confort thermique des bâtiments doit prendre également en compte l’ergonomie et l’organisation du travail (recherche de simplification du travail).
Aujourd’hui, les éleveurs soulignent un besoin important de réflexion sur la conception de bâtiment d’élevage et souhaitent préserver le revenu et la capacité d’investissement par des bâtiments efficients (performances des animaux ; l’efficacité du travail, santé des animaux). Un projet est en cours traitant du logement des jeunes (chevreaux et chevrettes) financé par le plan EcoAntibio 2. Le projet PEI Résilience des systèmes d’élevage caprins de Nouvelle-Aquitaine dans un contexte de changement climatique contribue également à faire émerger au travers de focus-group des solutions pour adapter les bâtiments d’élevages des chèvres laitières.
CHEF DE PROJET :
Le pilotage technique du projet a été confié à Patrick SALES (CDA 12) animateur régional du groupe métier régional bâtiments d’élevage-environnement.
Les pilotes des différentes actions sont Morgane LAMBERT IDELE, Eliette KARCHE MRE PACA et Lionel CHAUMONT CRA NA.
Le projet vise à adapter les bâtiments d’élevage de petits ruminants (chèvres laitières, brebis allaitantes, brebis laitières et ateliers d’engraissement (agneaux et chevreaux)) au changement climatique pour améliorer le confort thermique des animaux et des hommes. Pour ce faire, le projet a pour objectif de :
La première action servira à identifier des solutions innovantes. Elle sera basée sur un premier recensement des solutions existantes dans les départements partenaires et sur un benchmarking au niveau des pays méditerranéens. Un premier groupe de travail procèdera au tri des innovations à suivre en recherchant la complémentarité entre fermes en suivi rapproché et fermes commerciales et une répartition entre systèmes de production et zones géographiques.
La deuxième action consistera à évaluer et tester les solutions innovantes en conditions réelles en station expérimentale et en fermes commerciales (56 fermes dont 6 en suivi rapproché) à partir de mesures de température, observation des animaux, suivi zootechnique (alimentation, abreuvement, performances). Dans les fermes en suivi rapproché, les mesures et observations réalisées permettront notamment d’objectiver les seuils de stress thermique.
L’analyse de ces données permettra de mesurer précisément l’efficacité des solutions testées sur le confort thermique et de les caractériser au niveau économique, organisationnel et environnemental pour être transférables et adaptées aux besoins des éleveurs.
A l’issue de ce projet, la troisième action servira à élaborer des fiches sur les cas type d’innovations et des outils de diagnostics de vulnérabilité des bâtiments. L’organisation de formation ou de conférences (webinaire), des vidéos de témoignage ou des visites d’élevage, des articles de presse permettront de sensibiliser les prescripteurs (conseillers, artisans) et éleveurs aux enjeux du confort thermique en bâtiment. C’est également par ce biais que seront proposées des solutions concrètes et adaptées aux diversités de situations rencontrées.
La quatrième action visera à coordonner l’ensemble des partenaires et des actions, à veiller au bon déroulement de ce projet en s’appuyant sur la réunion de comités de pilotage et techniques dans le souci de créer une dynamique de travail collaborative.
BATCOOL associe de nombreux partenaires du Sud de la France. Il s’agit d’un projet déposé sur l’appel à projets d’innovation et de partenariat 2021 du CASDAR qui a débuté le 1er novembre 2021 le et prendra fin le 1er mai 2025.
Ce projet est soutenu par la Fédération nationale Ovine, France Brebis Laitière, Interprofession caprine CILAISUD caprins, Mutualité Sociale Agricole, Comité Nationale de la Brebis Laitière, Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse, Fédération Régionale des Groupements de Défense Sanitaire, Centre Interrégional d’Information et de Recherche en Production Ovine, Fédération Nationale des Eleveurs de Chèvres, financeurs du PCAE, lycée agricole de La Cazotte (12), Fédération départementale du bâtiment et des Travaux publics (12), l’Unité Mixte Technologique Systèmes caprins durables de demain (SC3D).
Sophie BACCHIN-VINET
Cheffe de service élevage et pastoralisme
Patrick SALES